Le palladium revient sur le devant de la scène après une période de turbulences. En 2021, son prix avait dépassé les 3 000 dollars l’once, un sommet historique alimenté par la demande automobile et la pénurie d’offre. Puis, en 2022-2023, la correction fut brutale : les cours ont plongé sous 1 000 $, refroidissant nombre d’investisseurs. Mais le marché n’a pas dit son dernier mot : après un passage sous les 1 000 $, le palladium est repassé au-dessus des 1 100 $ durant l’été 2025, signe d’un rééquilibrage entre demande et disponibilité.
Ce regain d’intérêt s’explique par une combinaison rare : un métal indispensable à l’industrie, une offre structurellement limitée et des tensions géopolitiques persistantes. Même affaibli, le marché reste sous tension, et le moindre déséquilibre peut provoquer une flambée de prix. Pour beaucoup d’investisseurs, le palladium redevient ainsi une valeur tactique, à la croisée de l’industrie et de la spéculation.
💡 Bon à savoir
Découvert en 1803, le palladium fait partie du groupe du platine (avec le platine, le rhodium et l’iridium). D’un blanc argenté et résistant à la corrosion, il est utilisé dans :
- ✅ les pots catalytiques automobiles
- ✅ certains composants électroniques
- ✅ la bijouterie haut de gamme
- ✅ les applications médicales
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Un métal rare, essentiel à l’industrie automobile
Le cœur du marché du palladium reste l’automobile. Environ 80 % de la demande mondiale provient encore des convertisseurs catalytiques des moteurs essence et hybrides. Ce métal a une propriété unique : il transforme les gaz d’échappement toxiques en éléments inoffensifs, ce qui permet aux constructeurs de respecter les normes environnementales toujours plus strictes.
Même si les véhicules électriques progressent, la majorité du parc mondial reste thermique ou hybride. Les nouvelles réglementations imposent d’ailleurs davantage de métaux catalytiques par véhicule, soutenant la demande à court terme. Autrement dit, la transition énergétique ne fait pas encore baisser la consommation de palladium : elle la rend simplement plus sélective et exigeante.
Les constructeurs automobiles n’ont pas de substitut immédiat. Le platine peut le remplacer dans certains cas, mais il reste moins efficace pour les moteurs essence. Le palladium conserve donc son rôle central dans la décarbonation progressive du transport routier.
Une offre sous tension et dépendante des risques géopolitiques
L’offre mondiale de palladium est extrêmement concentrée : la Russie et l’Afrique du Sud assurent ensemble près de 75 % de la production mondiale, soit environ 150 tonnes par an. Ce déséquilibre rend le marché vulnérable au moindre choc. Une grève dans une mine sud-africaine, un incident logistique ou une sanction commerciale peut instantanément affecter les prix.
La difficulté vient aussi du fait que le palladium est un sous-produit du nickel ou du platine. Les compagnies minières ne peuvent pas en extraire davantage sur commande. Une baisse de production de nickel entraîne automatiquement une baisse d’offre de palladium, ce qui alimente la volatilité du marché.
Depuis 2022, les sanctions contre la Russie ont accentué cette fragilité. Les menaces de restrictions sur les exportations ou d’embargos ont suffi à créer une spéculation intense. Indigo Precious Metals parle de « tight supply » (offre tendue) et de « tariff fears » (craintes de tarifs douaniers) — un cocktail qui maintient les cours dans une zone nerveuse.
💡 Bon à savoir
La production annuelle mondiale de palladium (moins de 200 tonnes) reste quinze fois inférieure à celle de l’or. De tels volumes rendent impossible toute stabilisation durable des prix : le marché est trop étroit pour absorber les chocs sans heurts.
Palladium vs autres métaux précieux
Le palladium appartient à la même famille que l’or, l’argent et le platine, mais son comportement diffère nettement. Là où l’or joue le rôle de valeur refuge, le palladium réagit avant tout à la conjoncture industrielle.
Or vs Palladium
L’or se valorise quand les marchés doutent ou que l’inflation menace, tandis que le palladium brille lorsque la production industrielle s’accélère.
En 2021, son prix avait même dépassé celui de l’or — une première historique. Depuis, la hiérarchie s’est rétablie : le ratio or/palladium tourne autour de 1,3 en 2025, confirmant que l’or reste plus stable tandis que le palladium demeure spéculatif.
Argent vs Palladium
L’argent combine une fonction monétaire et industrielle : il sert à la fois de réserve de valeur et de matière première pour les technologies vertes.
Le palladium, lui, est trente fois plus rare que l’or et son marché beaucoup plus petit. Cela se traduit par :
- ✅ une liquidité faible
- ✅ des écarts de prix plus violents
- ✅ des coûts de transaction élevés
Ce caractère “rare et nerveux” attire les investisseurs en quête de performance, mais il exige une tolérance au risque élevée.
Platine vs Palladium
Les deux métaux sont chimiquement proches et souvent substituables. Lorsque le palladium devient trop cher, l’industrie automobile se réoriente vers le platine.
Aujourd’hui, le platine vaut environ 900 $ l’once, contre 1 200 $ pour le palladium. Ce différentiel incite déjà certains constructeurs à revenir partiellement au platine, plus économique.
Mais la substitution a ses limites : le palladium reste plus performant pour les moteurs essence, tandis que le platine gagne du terrain dans les piles à hydrogène.
Comparatif des métaux précieux (2025)
| Métal | Nature | Points forts | Limites | Prix moyen 2025 |
| Or | Valeur refuge |
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≈ 2 400 $/oz |
| Argent | Industriel & monétaire |
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≈ 28 $/oz |
| Platine | Industriel & technologique |
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≈ 950 $/oz |
| Palladium | Industriel stratégique |
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≈ 1 200 $/oz |
Comment investir dans le palladium en 2025
Il existe plusieurs manières d’investir dans le palladium, selon son profil et sa tolérance au risque.
#1 - Les ETF spécialisés
L’ETF abrdn Physical Palladium Shares (PALL) reste la voie la plus simple. Chaque part correspond à une fraction d’once de palladium stockée physiquement.
- ✅ Frais de gestion : 0,6 %/an (plus que pour l’or).
- ✅ Bonne liquidité et accès direct via un compte titres.
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C’est le choix le plus pratique pour s’exposer au métal sans s’occuper du stockage.
#2 - Les contrats à terme (futures)
Le palladium se traite aussi sur le NYMEX, avec des variations spectaculaires. Au premier semestre 2025, les contrats à terme ont gagné plus de 20 %.
Ces instruments offrent un effet de levier puissant mais aussi un risque élevé — réservés aux traders expérimentés.
#3 - Le métal physique
Pièces et lingots de palladium existent, mais leur marché reste confidentiel. Les primes sont importantes (jusqu’à 20 %) et la revente difficile. C’est donc un placement de niche, plus proche de la collection que de l’investissement pur.
💡 Rappel
Pour la majorité des investisseurs, les ETF offrent le meilleur compromis entre liquidité, transparence et simplicité. Le physique n’a d’intérêt que pour la diversification patrimoniale à long terme.
Perspectives 2025-2030
Les prochaines années devraient rester marquées par une forte incertitude. Deux scénarios dominent :
Scénario haussier
- ✅ Les moteurs thermiques et hybrides conservent une part importante du marché
- ✅ Les normes antipollution se durcissent
- ✅ L’offre reste concentrée et vulnérable aux tensions géopolitiques
Dans cette hypothèse, les analystes estiment que le cours pourrait remonter vers 1 400 à 1 500 $ l’once d’ici fin 2025.
Scénario baissier
- ⚠️ L’adoption des véhicules électriques s’accélère
- ⚠️ Le recyclage des catalyseurs augmente l’offre secondaire
- ⚠️ Le platine, moins cher, gagne du terrain
Certains experts, comme le World Platinum Investment Council, anticipent même un excédent de marché à partir de 2025 si le recyclage progresse. Le palladium pourrait alors se stabiliser autour de 1 000 $ l’once, voire légèrement en dessous.
💡 Bon à savoir
Les analystes d’Indigo Precious Metals qualifient le marché de « bullish, not euphoric » : optimiste, mais sans emballement. La demande reste solide, mais les perspectives à long terme dépendront entièrement de la vitesse de la transition énergétique.
Conclusion
Le palladium reste un métal à part : à la fois industriel et spéculatif, indispensable mais vulnérable.
Après l’euphorie des années 2019-2021 et la chute qui a suivi, il retrouve en 2025 une stabilité prudente. Sa rareté, sa sensibilité géopolitique et son rôle crucial dans les pots catalytiques en font toujours un actif stratégique.
Pour l’investisseur, il peut constituer une exposition tactique, corrélée à la croissance mondiale, sensible aux cycles industriels, et susceptible d’offrir un rebond si les tensions d’offre persistent.
Mais c’est aussi un actif exigeant, réservé à ceux qui acceptent la volatilité et le risque de retournement rapide.
Dans un portefeuille diversifié, le palladium conserve toute sa place comme pari mesuré sur la rareté et la technologie automobile, tant que le moteur à combustion n’a pas encore tiré sa révérence.