Le phénomène des « finfluenceurs » sur TikTok et Instagram

Olivier De Vitton23/11/22 (mise à jour il y a 1 an, 5 mois)tiktok, facebook, instagram, youtube

Le phénomène des « finfluenceurs » sur TikTok et Instagram
Le phénomène des « finfluenceurs » sur TikTok et Instagram

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Sur les réseaux sociaux, en particulier TikTok et Instagram, même si aucun réseau social n’est épargné par le phénomène, de plus en en plus de créateurs de contenu s’emparent des sujets économiques et financiers, sans toujours disposer de l’expertise pour le faire. Le phénomène n’est pas marginal et il inquiète les autorités.

Finfluenceurs ?

Finfluenceurs
Finfluenceurs ou “Financial Influenceurs”

Ce terme ne vous évoque peut-être rien, mais vous en avez probablement croisé si vous êtes un inconditionnel des réseaux sociaux. Telle influenceuse qui vous promet de vous livrer ses secrets pour devenir riche rapidement, tel autre qui vous explique quelles cryptos acheter, ou encore cette instagrameuse qui décrypte pour vous les intérêts composés et vous propose une sélection d’ETFs. Tous sont des “Financial Influenceurs”, c’est-à-dire qu’ils se positionnent en conseillers financiers et que leur popularité sur les réseaux leur confère un véritable pouvoir d'influence.

A la faveur de l’engouement pour les cryptoactifs qui étaient encore très haussiers il n’y a pas si longtemps, ou encore des marchés financiers bullish dopés artificiellement par le quantitative easing et les politiques accommodantes des banques centrales, un large public s’est intéressé aux investissements boursiers et à la possibilité de l’”argent facile”. Et de plus en plus d’influenceurs se sont engouffrés dans la brèche, en affichant parfois une richesse ostentatoire (grosse voiture, piscine, villa, …) pour mieux vendre leurs conseils en matière d’investissement. Posts pédagogiques, vidéos pêchues et ludiques, mise en scène légère et enthousiaste, ils vantent leurs astuces et secrets pour mieux gérer son budget personnel et s’enrichir, ils mettent en avant telle nouvelle cryptomonnaie prometteuse ou telle nouvelle application de trading.

L’inquiétude des autorités et la mise en garde de l’agence de régulation financière de Chypre (CySEC)

nabilla

On se souvient de Nabilla, en 2018, faisant la promotion d’un site pour trader le bitcoin en déclarant notamment que “c’est gratuit, il n’y a rien à perdre ”.

Sur Snapchat la star de la téléréalité vantait les mérites d’une société de trading sans mentionner les risques associés à cette activité ni indiquer qu’il s’agissait pour elle d’un partenariat rémunéré. La vidéo avait fait grand bruit. Si pour n’importe quelle produit d’investissement classique, pareille publicité est interdite par la réglementation, le bitcoin et les autres cryptomonnaies échappent à cette réglementation. Cela n’a pas empêché l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) à l’époque de recadrer, sur Twitter, les propos de Nabilla : "Le Bitcoin, c'est très risqué ! On peut perdre toute sa mise. Pas de placement miracle. Restez à l'écart." Trois ans plus tard, l’affaire est revenue sur le devant de la scène puisque Nabilla a été condamnée à 20 000 euros d’amende pour “pratique commerciale trompeuse” après que la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF), administration française relevant du ministère de l'Économie, se soit penchée sur l’affaire.

Outre les pratiques parfois illégales des influenceurs, le problème réside dans le couplage de connaissances souvent fort lacunaires du grand public en matière financière et la pression sociale exercée par les réseaux sociaux. L'appât du gain et la croyance en l’argent facile engendrent des désastres financiers où beaucoup ont vu leurs économies disparaître.

Mais les autorités réagissent. En juillet 2022 l’agence de régulation financière de Chypre (CySEC) a annoncé le lancement d’un programme de protection des nouveaux investisseurs. Cette campagne qui se positionne en réponse à la promotion grandissante d’instruments complexes et risqués sur les réseaux sociaux met en garde les investisseurs débutants au sujet de toute décision d’investissement fondée sur les émotions et la pression sociale plutôt que sur une véritable expertise des marchés et des analyses rationnelles.

La chasse aux finfluenceurs sur TikTok et autres réseaux sociaux

La plateforme TikTok, qui avait été l’un des principaux lieux du battage médiatique autour du Doge Coin en 2020 et 2021, a pris une décision radicale en juillet 2021 en interdisant la promotion de tous les services et produits financiers. L’espace financier de la plateforme, “FinTok”, était devenu un important lieu de spéculations massives, d'exagérations et de désinformations en tout genre.

D’autres réseaux ont également organisé des discussions autour des marchés financiers et posé certaines limites. C’est notamment le cas de Reddit, qui a été au centre des attentions lorsque ses “traders fous” ont fait s’envoler le Doge de 800%.

Rappelons que les influenceurs ne sont pas censés faire n’importe quoi sur les réseaux sociaux. Rémunérés par le biais de contrats commerciaux, ils se professionnalisent et à ce titre ils doivent se conformer aux règles prévues par le code de la consommation.

Les conseilleurs ne sont pas les payeurs

Il s’agit de prendre avec mesure les conseils des autres car la décision finale n'engage, en termes de responsabilité, que le décideur. N’est pas conseiller financier qui veut. C’est un métier qui est encadré et qui exige une véritable expertise, un certain devoir de réserve de même que de mise en garde. Or, beaucoup de finfluenceurs n’ont pas les compétences de leurs propos, et ils vantent parfois des systèmes de Ponzi sans même en avoir conscience ! La confiance affichée par certains finfluenceurs n’est en rien un gage de compétence.

Ce qui est problématique avec les réseaux sociaux, c’est qu’ils tendent à rapporter la valeur d’un post non pas à l’expertise dont il témoigne mais au nombre de likes et de followers qu’il déclenche et provoque. Pourtant, ce n’est bien sûr pas parce qu’un post fait le buzz en étant très partagé et commenté que ce qu’il énonce est vrai, exact, pertinent. Faire preuve d’esprit critique en vérifiant, analysant, comparant et mettant en doute le propos véhiculé demeure indispensable pour ne pas sauter aveuglément sur une prétendue opportunité et finir par y laisser des plumes.

Un dangereux effet de masse et une course au gain facile

L’effet de masse peut être dangereux. On l’a vu avec l’action Gamestop qui a connu une explosion de son cours fin janvier 2021, une hausse de 1500% en seulement deux semaines. Une telle volatilité fondée sur des “mouvements de foule” influencés par certains créateurs de contenu présente des risques indéniables pour les investisseurs en herbe. L’appât du gain, la peur de manquer une opportunité, l’émulation et la pression sociale déclenchent des décisions d’investissement irrationnelles. Le risque de rester bloqué sur un niveau de cours imprévu est très grand. De plus, le plus souvent la corrélation entre la qualité de la valeur mise en avant, des points de vue chartistes et/ou fondamentaux, et la qualité réelle de l’actif, n’est pas au rendez-vous. N’oublions pas, d’après un rappel de l’AMF, que “9 clients sur 10 des applications de trading sont perdants”.

Les grands gagnants de ces manipulations sont les influenceurs.

Nous ne connaissons pas la teneur exacte de l’intérêt réel en jeu pour le finfluenceur. Il peut suffire que son post fasse un buzz, que le cours de l’action aille dans la direction qu’il souhaite, que la plateforme qu’il met en avant connaisse un bond de fréquentation. De fait, les finfluenceurs sont souvent rémunérés en rétrocommissions par les différentes applications de trading qu’ils promeuvent.

Les finfluenceurs : un fléau ?

Les finfluenceurs : un fléau ?

Faut-il pour autant bannir les finfluenceurs de l’espace public ? Nous le pensons pas, car ce phénomène témoigne d’une démocratisation des placements financiers et il peut somme toute présenter des intérêts pour les investisseurs particuliers. Mais certaines conditions doivent être observées. Du côté des finfluenceurs, les règles légales doivent être respectées et la transparence doit être de mise. Quant aux particuliers, ils ont tout intérêt à exercer leurs propres jugements sur ce qui est publié en ligne. Car tout n’est pas à jeter, et il y a aussi des contenus sérieux, mesurés et argumentés, qu’il s’agit de reconnaître. Un bon post devrait inciter le particulier à se documenter par lui-même et à élargir ses propres connaissances. Il peut révéler de réelles opportunités non encore identifiées. On peut penser que c’est plutôt une bonne chose que la finance ne soit plus un domaine exclusivement discuté, analysé et commenté par des experts dont c’est la profession. Les partages et les discussions font la richesse d’une communauté. Que chacun se sente en droit de partager son avis plus ou moins fondé sur telle ou telle valeur, pourquoi pas, à condition seulement de ne pas déléguer plein pouvoir à ces avis.

Avant tout, il convient de garder la tête froide, d’être bien conscient que les rendements élevés et assurés n’existent pas et que l’on ne devient pas riche en quelques mois. De plus, vérifier que tel courtier en ligne est autorisé sur le territoire français et reconnu par l’AMF. Éviter les instruments à effet de levier et ne jamais prendre pour argent comptant un “conseil” véhiculé sur les réseaux sociaux.Toujours multiplier et recouper les sources et conserver une distance critique. Bref, il est d’abord question de s’éduquer par soi-même et d’apprendre à séparer le bon grain de l’ivraie.

Dernière mise à jour le 23/11/22

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